ICPF Networking XIII : Qualité et financement de la formation, quels enjeux pour la sous-traitance des actions CPFLogo icpf

ICPF Networking XIII : Qualité et financement de la formation, quels enjeux pour la sous-traitance des actions CPF

25/3/2024

Le jeudi 14 mars 2024, lors de la 13ème édition de ICPF Networking à l’Apostrophe dans le 16ème, s’est tenu une table ronde sur le thème des évolutions réglementaires relatives à l'encadrement de la sous-traitance des actions référencées sur MCF (Mon Compte Formation) et plus globalement de la qualité et du financement de la formation.

Retrouvez dans cet article un retour en grande ligne sur cette table ronde animée par Cyril DUCHAMP, rédacteur en chef adjoint du Groupe AEF, avec les intervenants :

Cécile BERTRAND, Cheffe du pôle "compte personnel de formation" à la DGEFP  

Géraldine BOUREAU, Responsable du service régulation et financements de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC)

Claire KHECHA, Déléguée générale des Acteurs de la compétence

Natanael WRIGHT, Président fondateur de Wall Street English

I. Les objectifs visés par le décret n° 2023-1350 du 28 décembre 2023 sur le CPF et la sous-traitance

Rappel des dispositions majeures

Une des dispositions majeures de ce Décret concerne l’encadrement de la sous-traitance des organismes de formation référencés sur Mon Compte Formation, qui prendra effet à partir du 1er avril 2024. Elle vise à établir des règles claires pour éviter les abus et les fraudes tout en maintenant la qualité des formations dispensées. Cette période permet aux organismes de formation de se conformer aux nouvelles exigences réglementaires.

Limiter le recours excessif à la sous-traitance

Le 03 janvier 2024, l’arrêté fixe un plafond de 80 % du chiffre d’affaires qu’un organisme de formation peut confier à un sous-traitant. Cette régulation fait suite à un décret du 28 décembre 2023 visant à restreindre le recours excessif à la sous-traitance dans le cadre du CPF et à encadrer en particulier la pratique du “portage Qualiopi“ où une action de formation est réalisée par un organisme ou un formateur en "bénéficiant" de la certification du donneur d’ordres. Alors que la sous-traitance dans le cadre du CPF était déjà encadrée, cette nouveauté pour 2024 chamboule de nouveau ce fonctionnement.

Ce plafonnement a pour objectif de faire en sorte que les organismes de formation restent responsables de la qualité des formations dispensées, même lorsqu’ils externalisent certaines parties du processus.

« Cet encadrement s’est fait en concertation avec les représentants du secteur et il a été souhaité que ce soit à un niveau qui permette que l’organisme de formation réalisé une partie ou une action de formation. Il a été fixé en cohérence avec l’esprit de la Loi mais également le fait de faire perdurer des modèles économiques d’organismes de formation existants sans déstabiliser le marché » précise Cécile BERTRAND.  Elle indique également que ce plafond s’apprécie sur tout ce qui a été facturé à la Caisse des Dépôts et Consignations par l’organisme de formation.

Garantir la qualité des actions sous-traitées

Ce Décret renforce la nécessaire adhésion aux normes de qualité (Qualiopi) et vise à maintenir l’intégrité du marché du CPF. Ainsi, les sous-traitants sont soumis à l'obligation de détenir la certification Qualiopi sauf s'ils relèvent du régime micro-social et déclarent un chiffre d’affaires annuel inférieur à 77 700 € HT.

Les sous-traitants devront également bénéficier d’une habilitation à former pour les certifications sur lesquelles ils interviennent sauf s’ils dépendent également du régime micro social avec un CA < 77 700 euros et s’ils n’interviennent que sur une partie du parcours de formation ET que l’intervention ne couvre pas un bloc de compétences (dans le cadre du RNCP).

Dans la même logique, toujours pour préserver la qualité des prestations et d’éviter les pratiques abusives, le décret interdit la sous-traitance en cascade. Il stipule également que le sous-traitant ne peut pas réaliser une action s’il fait l’objet d’une sanction de déréférencement CPF.

Retrouvez l'ensemble des dispositions de ce Décret dans cet article.

Vers une régulation des conditions de recours de la sous-traitance dans le cadre du CPF

En complément des récentes évolutions réglementaires évoquées précédemment, le décret du 28 décembre 2023 apporte d’importantes précisions quant à la sous-traitance dans le cadre du CPF.

Procédure d’encadrement des sous-traitants et sa mise en œuvre

Obligation de détention Qualiopi : un pas vers la professionnalisation

L’article 2 du décret précise que les sous-traitants doivent à présent respecter les mêmes obligations que les donneurs d’ordres et prestataires référencés. Pour Cécile BERTRAND, l’intention est de lutter contre les "coquilles vides" de certains OF qui, lors des contrôles opérés par la CDC, se défaussent sur leurs sous-traitants. Elle ajoute qu’avant le Décret, il existait déjà un encadrement de la sous-traitance dans le cadre du dispositif "DIF élus".

Outre le respect des exigences légales et réglementaires, les sous-traitants doivent obtenir la certification Qualiopi. Si ces obligations ne sont pas respectées par le sous-traitant et le donneur d’ordres, la Caisse des dépôts peut procéder au déréférencement de l’organisme de formation donneur d'ordres, après mise en demeure selon les modalités réglementaires. Pour la représentante de la DGEFP : "la règle générale est de détenir Qualiopi que ce soit pour le donneur d'ordres que le sous-traitant. Cependant, tous les indicateurs ne sont pas applicables aux sous-traitants dans les mêmes conditions qu’aux donneurs d’ordres. D'où la dispense de certification Qualiopi pour le sous-traitant auto-entrepreneur avec un CA inférieur à 77 700€ / an".

Claire KHECHA nous rappelle à juste titre que la sous-traitance est bonne et saine. Elle permet de faire appel aux meilleurs professionnels. Le problème ce sont les organismes certifiés Qualiopi qui "bluffent" sur la qualité des formations sous-traitées. C’est la raison pour laquelle elle plaide pour faire évoluer la certification Qualiopi en intégrant la qualité pédagogique.

Lors des concertations avec les représentants notamment des auto-entrepreneurs, il est constaté parfois une grande précarité chez les sous-traitants, souligne Cécile BERTRAND. L'encadrement avec la détention de Qualiopi par les sous-traitants est aussi un pas vers la professionnalisation et peut-être une incitation à ne pas rester durablement sous-traitant pour exercer en direct.

Obligation d’obtenir une habilitation à former

La Cheffe du pôle "compte personnel de formation" à la DGEFP ajoute également un autre principe : les sous-traitants doivent avoir une "habilitation à former", qui s'ajoute donc à Qualiopi. Claire KHECHA souligne que l'habilitation à former ne pose pas de problème. L'habilitation sur la certification pour laquelle le sous-traitant intervient, oui potentiellement, s'il faut des autorisations de France compétences pour tous les sous-traitants pour former sur un titre RNCP ou RS.  

Précisions sur le contrat de sous-traitance

Comme précisé dans la nouvelle version V9 du Guide de lecture du Référentiel National Qualité applicable depuis le 8 mars 2024, le contrat de sous-traitance entre le donneur d’ordre et le sous-traitant est désormais obligatoire et doit être minutieusement défini. Il doit inclure des modalités spécifiques et précises.  

II. CPF et Sous-traitance : Nouvelles obligations des donneurs d'ordre

La loi anti-fraude de décembre 2022 sonne la fin de la partie en ouvrant la voie à un encadrement de la sous-traitance sur ce marché sensible. En première ligne, le donneur d'ordre est responsable de la mise en conformité de ses sous-traitants. C'est bien lui qui risque, le cas échéant, un déréférencement.

Le contrat

Pour garantir la transparence et éviter la précarité des relations professionnelles, le contrat réalisé entre le donneur d’ordre et le sous-traitant devra être clair et précis et comporter des éléments clés :

  • l’intitulé de la prestation,
  • son objectif global ainsi que le contenu détaillé des actions à réaliser par le sous-traitant. Cela permet d’éviter toute ambiguïté sur les tâches qui lui sont attribuées,
  • les moyens utilisés : afin de bien définir les ressources et les moyens que le sous-traitant pourra mobiliser pour mener à bien sa mission ;
  • la durée et période de réalisation,
  • les modalités de suivi, de justification, d’évaluation et de sanction de la prestation,
  • le prix et les modalités de paiement : les aspects financiers sont essentiels dans tout contrat. Ainsi, le montant de la prestation, les échéances de paiement ainsi que les modalités de facturation doivent être clairement établis.

Les documents obligatoires

Cécile BERTRAND confirme que le donneur d’ordre doit vérifier :

  • l’existence d’un numéro de déclaration d’activité du sous-traitant,
  • la possession de la certification Qualiopi et l’habilitation à former,
  • le non-déréférencement sur MCF,
  • la conformité de son sous-traitant avec les impôts et l'Urssaf.

Pour Natanael WRIGHT, ces obligations peuvent poser problème à certains organismes mais ce n'est pas nouveau. Pour les auto-entrepreneurs en particulier, il leur faut un NDA, ce qui n'est pas compliqué selon lui à obtenir mais le donneur d'ordre doit veiller à ce que tous ses sous-traitants l'aient.

Afin de faciliter cette vérification, les Acteurs de la Compétence, en lien avec la DGEFP, ont publié une infographie claire sur les éléments de contrôle à destination des organismes donneur d'ordres, rappelle la déléguée Générale Claire KHECHA.

III. Donneur d'ordres et Sous-traitant : Comment se mettre en conformité sur MCF ?

Le sous-traitant devra justifier de l'habilitation à former et de la certification Qualiopi. Pour le moment, la procédure pas automatisée, indique la représentante de la CDC. De ce fait, l'organisme donneur d’ordres effectuera une déclaration en fournissant comme justificatif les contrats de sous-traitance. L'idée est d'apporter une "fluidité" sur le côté opérationnel, pour tendre vers la simplification et l'automatisation.

A terme, les donneurs d’ordres feront une déclaration annuelle du CA réalisé en sous-traitance sur le CPF et fourniront un listing de leurs sous-traitants.

IV. Déroulement des contrôles des actions CPF sous-traitées

Les représentants de la CDC et de la DGEFP précisent que la déclaration de CA sera faite en 2025 sur l'année 2024, mais la Caisse des Dépôts pourra contrôler en 2024 que les sous-traitants interviennent en détenant une habilitation et une certification Qualiopi.

D’ailleurs, le décret comprend également des dispositions sur le contrôle, notamment la possibilité pour les OPCO de contrôler la qualité et la possibilité de le sous-traiter (le décret devra être précisé sur ce point). Les contrôles démarreront fin 2024.

Géraldine BOUREAU informe qu’une mission menée par les inspections a conclu que, statistiquement, il n'y a pas tant de multiplication des contrôles. Même s'il y a une redondance apparente, les contrôles ne ciblent pas la même chose. Des réflexions sont en cours avec des réunions entre financeurs pour définir des axes de contrôle commun à partager.

En somme, ces nouveaux textes réglementaires visent à garantir une plus grande transparence, qualité et responsabilité dans le domaine de la formation professionnelle, tout en contribuant à la sécurisation du CPF. Une FAQ de la DGEFP va être publiée prochainement sur le site du Ministère du Travail. Elle comprendra les questions les plus récurrentes sur l'application de ce décret afin de répondre à toutes les interrogations des acteurs concernés.

Restez attentifs aux prochaines évolutions et à leurs impacts sur le secteur de la formation professionnelle. Nous vous donnons RDV le 13 juin prochain à l’occasion de la 14ème édition de ICPF Networking.

Liens utiles :

Décret du 28/12/2023

Obligations en matière de sous-traitance

Infographie des Acteurs de la Compétence sur les points de contrôle du donneur d'ordres

Dernier replay du webinaire CPF et Sous-traitance

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Auteur
Séverine FINGAL

Séverine FINGAL

Auditrice
ICPF
Résumé
Retrouvez dans cet article un retour sur la table ronde de ICPF Networking XIII sur le thème des évolutions réglementaires relatives à l'encadrement de la sous-traitance des actions référencées sur MCF.
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